Méningococcémie

 

La méningococcémie est une diffusion bactériémique du méningocoque à partir du nasopharynx ; elle peut se présenter sous la forme d’une septicémie, qui peut être fulminante (syndrome de Waterhouse-Friderichsen), d’une méningite ou d’une méningococcémie chronique ; elle est caractérisée par l’association d’une fièvre, de lésions purpuriques en particulier pétéchiales, d’une hypotension, de signes de méningite, et par un taux de morbidité et de mortalité élevé.

EPIDEMIOLOGIE

Âge L’incidence est la plus élevée chez les enfants entre 6 mois et 1 an ; elle est la plus faible après 20 ans

Groupes à risque Splénectomisés. Ethyliques chroniques. Déficit en complément, en particulier des fractions C5 à C8

Etiologie Neisseria meningitidis ou méningocoque est un coccus Gram négatif. Le taux de portage nasal est de 5 à 15 %.

Mode de transmission. Transmission interhumaine par l’inhalation sous forme d’aérosols de gouttelettes de sécrétions nasopharyngées infectées.

Saison L’incidence la plus élevée est observée au milieu de l’hiver, au début du printemps ; la plus faible se situe au milieu de l’été.

Répartition géographique Présente sur l’ensemble du globe. Elle apparaît en épidémie ou de façon sporadique.

HISTOIRE DE LA MALADIE

Prodromes Toux, céphalées, douleur pharyngée, nausées/vomissements. Cette période peut être très courte

Manifestations systémiques

MENINGOCOCCEMIE AIGUË Fièvre oscillante, frissons, arthralgies, myalgies. Un état stuporeux, des lésions hémorragiques, une hypotension peuvent être observés dans les toutes premières heures au cours des méningococcémies fulminantes.
MENINGOCOCCEMIE CHRONIQUE Fièvre intermittente, rash cutané, myalgies, arthralgies, céphalées, anorexie.

EXAMEN CLINIQUE

Apport du patient Le patient est brutalement malade, avec un état de prostration marqué.

Signes vitaux Fièvre élevée, polypnée, tachypnée, tachycardie, légère hypotension.

Manifestations cutanées

TYPE De façon caractéristique, pétéchies de petite taille, irrégulières, tachetées, souvent en relief avec un centre vésiculeux, pâles, grisâtres.Des lésions fugaces, urticariennes, maculeuses/papuleuses peuvent être observées. Des macules/papules/pétéchies (1 à 3 mm) rosées, discrètes sont présentes dans 75 % des cas. Lésions éparses. Elles peuvent être entourées d’un halo plus clair. Forme fulminante : purpura, ecchymoses, nécroses confluentes, de forme souvent bizarre et de couleur grisâtre à noir en cas de coagulation intravasculaire disséminée CIVD dans les formes fulminantes. Tableau identique au purpura fulminans.

DISTRIBUTION Le plus souvent au niveau du tronc, des extrémités, mais peuvent siéger n’importe où, en particulier sur les paumes et les plantes.

MUQUEUSES Pétéchies sur le palais

MENINGOCOCCEMIE CHRONIQUE Apparition intermittente des lésions. Lésions maculeuses et papuleuses, généralement localisées en regard d’une ou de plusieurs articulations douloureuses ou au niveau des zones  de pression. Lésions cutanées à type de d’érythème noueux EN sur les mollets. Présence de pétéchies, qui peuvent évoluer vers la formation de vésicules ou de pustules. Hémorragie brutale entourée d’une aréole pâle. Zones purpuriques avec un centre pâle, bleu-gris ; nodules hémorragiques, sensibles.

EXAMEN GENERAL

Méningite De 50 à 88 % des patients atteints de méningococcémie développent une méningite. Présence de signes d’irritation méningée, troubles de la conscience. Agitation, état maniaque. Signes d’hypertension intracrânienne.

Rarement Arthrite septique, péricardite purulente, endocardite bactérienne.

Forme clinique Méningocccémie fulminante avec hémorragie surrénalienne (syndrome de Waterhouse-Friderichsen).
Méningococcémie chronique Fièvre intermittente, arthrite/arthralgie.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

Méningococcémie aiguë et méningite Bactériémies aiguës, et endocardites, vascularite « d’hypersensibilité » aiguë, infection à entérovirus, fièvre boutonneuse des Montagnes Rocheuses, toxic shock syndrome TSS.

Méningococcémie chronique Endocardite bactérienne subaiguë, rhumatisme articulaire aigu RAA, purpura de Schönlein-Henoch, fièvre après morsure de rat (sodoku), érythème polymorphe EP, gonococcémie.

EXAMENS COMPLEMENTAIRES

Histopathologie cutanée Au cours des méningococcémies chroniques, aucune bactérie ne peut être observée. Présence d’infiltrats mononucléés périvasculaires. Ces lésions sont probablement médiées par une réaction immune.

Coloration de Gram Des grattages réalisés sur les lésions nodulaires permettent de mettre en évidence des diplocoques Gram négatif.

NFS plaquettes Hyperleucocytose à polynucléaires.

Cultures Hémocultures : méningococcémie aiguë, isolement des méningocoques dans près de 100 % des cas ; méningites : un tiers de positif. Culture du liquide céphalorachidien LCR : généralement positif. Mise en culture des biopsies cutanées : jusqu’à 85 % des résultats positifs.

DIAGNOSTIC

Impressions cliniques confirmées par les cultures bactériologiques.

PHYSIOPATHOLOGIE

Le foyer infectieux initial est généralement une infection infraclinique nasopharyngée. La peau et les méninges sont colonisées après dissémination par voie hématogène. L’endotoxine semble être impliquée dans la survenue d’une hypotension et d’un collapsus cardiovasculaire. La coagulation intravasculaire disséminée CIVD observée au cours des méningococcémies fulminantes est identique à la réaction de Schwartzman. Les méningocoques peuvent être mis en évidence dans les cellules endothéliales et les polynucléaires neutrophiles. Des altérations endothéliales localisées, des thromboses et une nécrose de la paroi des vaisseaux peuvent survenir. Les lésions cutanées caractéristiques – macules, papules, pétéchies, lésions hémorragiques et bulleuses – sont secondaires à l’œdème, à la nécrose cutanée et à l’extravasion des globules rouges. Des lésions vasculaires identiques sont présentes au niveau des méninges et d’autres organes. La fréquence des manifestations cutanées hémorragiques au cours des infections à méningocoques, en comparaison avec les infections à d’autres germes Gram négatif, serait due au pouvoir accru et/ou à la propriété unique des endotoxines du méningocoque d’entraîner une réaction dermique. Par ailleurs, les endotoxines lipopolysaccharidiques du méningocoque et de l’Escherichia coli ont la même capacité d’induire une réaction généralisée de type Schwartzman, létale chez la souris. Au cours de méningococcémies chroniques, généralement en période de fièvre, de rash et de manifestations articulaires, les méningocoques peuvent être isolés dans le sang circulant ; une relation inhabituelle entre l’hôte et l’agent infectieux est essentielle pour permettre cette infection persistante.

EVOLUTION ET PRONOSTIC

Méningococcémie aiguë En l’absence de traitement, l’évolution est fatale. En cas de traitement adéquat, les taux de guérison pour les méningites ou les méningococcémies sont > 90 %. Le taux de mortalité en cas de maladie grave ou de syndrome de Waterhouse-Friderichsen reste très élevé. Le pronostic est mauvais, quand les lésions purpuriques / ecchymotiques sont présentes au moment du diagnostic.

Méningococcémie chronique En l’absence de traitement, des rechutes peuvent s’observer sur plusieurs semaines jusqu’à 8 mois ; la durée moyenne est de 6 à 8 semaines ; elle peut évoluer vers une méningococcémie aiguë, une méningite ou une endocardite ; 100 % de guérison sous traitement antibiotique.

PRISE EN CHARGE

Vaccination < 20 % des méningocoques isolés associés à une affection appartiennent aux méningocoques, pour lesquels des vaccins sont disponibles.

Prévention pour les sujets contacts d’un patient atteint de méningococcémie

SULFADIAZINE La prévention par sulfamides a été abandonnée du fait de la résistance des souches de méningocoques aux sulfamides.

RIFAMPICINE 600 mg 2 fois par jour chez les adultes, 10 mg/kg/jour en 2 fois chez les enfants de 1 à 12 ans, ou 5 mg/kg/jour en 2 fois chez les nouveau-nés pendant 2 jours. Autres traitements : minocycline 100 mg 2 fois par jour pendant 5 jours chez les adultes ; la ciprofloxacine est aussi efficace.

Antibiothérapie

PENICILLINE G 300,000 unités/kg/jour par voie intraveineuse jusqu’à 24 millions d’unités par jour. Autres traitements : ceftriaxone, céfotaxime.

AMPICILLINE Par voie intraveineuse pendant 10 jours

CHLORAMPHENICOL En cas d’allergie à la pénicilline

Fitzpatrick TB et al., Atlas en couleurs de dermatologie clinique, dermatoses communes et dermatoses graves, 3ème édition, Mc Graw Hill 1997

 

Rifampicine (Rifadine 300° Aventis HMR Roussel Diamant, Rimactan 300° Novartis)

Prophylaxie des méningites à méningocoques :

La rifampicine sera donnée pendant 48 heures à la posologie suivante :

- adulte : 600 mg toutes les 12 heures ;

coût du traitement journalier : 7.69 FF (2 gél) ;

- nourrisson et enfant (entre 1 mois pour la suspension buvable, ou 7 ans pour les gélules, et 15 ans) : 10 mg / kg toutes les 12 heures ;

coût du traitement journalier : 0.26 FF / kg (gél) ; 0.36 FF / kg (susp buv)

- nouveau-né (avant 1 mois) : 5 mg / kg de suspension buvable toutes les 12 heures ;

coût du traitement journalier : 0.18 FF / kg

 

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